Les plantes, une nécessité face aux difficultés d’accès aux soins

Le plateau Leste est un plateau volcanique perché à plus de 1200 mètres d’altitude. Pour y arriver, deux mini-bus par jour parcourent la route traditionnelle pavée à travers les volcans.

Dérèglements climatiques

Rien à voir avec Losna dans la vallée de Tor, où l’eau abonde. Deux formes d’agriculture existent à Santo Antao : l’agriculture irriguée (regadiou) et l’agriculture pluviale (de sequeiro). Sans précipitations, les habitants des zones d’agriculture pluviale souffrent des quatre dernières années de sécheresse qui sévissent à Santo Antão.

L’archipel a toujours connu des périodes de sécheresse, mais le changement climatique semble visible sur la végétation locale. Les cultures de café se sont déplacées vers les hauteurs. Les papayes sont apparues où le climat était plus frais.

Des paysans récoltent les quelques épis de maïs qui résistent. La précarité est flagrante. Ces territoires quasiment autonomes, les échanges monétaires sont très limités. Quelques euros pour payer une consultation médicale, sont souvent hors d’accès à ces populations paysannes. Sans eau, plus d’aliments pour se nourrir, plus de remèdes pour se soigner.

Ici, la médecine naturelle n’est pas un phénomène de mode, et encore moins un luxe comme en Europe, mais bien une nécessité. 

« Avant d’amener un enfant à l’hôpital, on le soigne d’abord avec des plantes. »

Géralda, habitante de Corda

AMUPAL

Je rencontre Josefa, une vraie guerrière qui se bat pour le développement de sa communauté. À la tête de l’association AMUPAL, une association de femmes dans la communauté d’Agua das Caldeiras, elle m’impressionne. Elle jongle entre de nombreux projets associatifs avec aisance et gère son association comme une cheffe de famille. Elle n’a jamais fait d’études mais tout appris par elle-même avec l’expérience des autres. Elle m’explique la réalité de l’accès aux soins médicaux dans les communautés rurales, où les plantes sont encore les premiers remèdes. 

Josefa, en préparation de liqueur à base de plantes médicinales

« Même quand j’ai peu, je partage ce peu avec ceux qui n’ont rien. » 

Josefa, présidente de l’association AMUPAL

Il y a beau avoir des médecins désormais à Santo Antão, les soins médicaux sont encore difficilement accessibles pour la majorité de la population. Les médicaments pharmaceutiques sont en partie pris en charge par l’État cap verdien, mais le coût total d’une consultation reste loin d’être négligeable. Le transport, la consultation, et les médicaments représentent au final une somme conséquente pour des paysans sans emploi qui vivent au jour le jour.

« Les gens prennent des plantes parce qu’ils ne peuvent se payer une consultation et un médicament. C’est pourquoi je pense que ces plantes sont miraculeuses, et particulièrement pour les pauvres. »

Josefa, présidente de l’association AMUPAL

Même sans difficultés financières, cueillir une plante pour en faire une infusion reste bien plus facile et rapide qu’un aller retour en transport collectif jusqu’à Porto Novo, la ville la plus proche, pour acheter un médicament à la pharmacie.  L’usage des plantes locales s’impose alors comme une évidence. Tisanes de romarin, peau de citron, pahla texeira (une herbacée originaire d’Amérique), ou feuille de gingembre, sont des remèdes couramment utilisés par la population.

Or les plantes qui poussaient abondamment se font de plus en plus rares avec ces trois dernières années de sécheresse. La flore de l’archipel est largement menacée et cette situation s’est aggravée cette dernière décennie. Plus des deux tiers des espèces végétales sont en voie de disparition au Cap Vert. Les espèces endémiques, qui n’existent qu’au Cap vert, sont particulièrement touchées. Les causes ? L’arrachage sauvage, le pâturage libre, les espèces invasives et les irrégularités de précipitations.

Josefa et les membres de l’association AMUPAL

«Si nous nous comportons mal avec la nature, elle nous le rend en retour. Quand une espèce disparait, nous n’avons plus de plantes pour nos remèdes naturels. Nous avons des douleurs sans pouvoir les guérir. »

Josefa, présidente de l’association AMUPAL.

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