Phytothérapie, une médecine encore loin d’être reconnue au Cap Vert

Une infirmière hors norme

Aleida, la sœur d’Adelso, a la même bonté que toute sa famille. Une générosité si grande que j’ai retrouvée à chaque rencontre faite à Santo Antão sans exception. Infirmière à la délégation de santé, elle s’est formée par elle-même à la médecine par les plantes. Si elle tenait de son père un savoir traditionnel sur l’utilité des plantes locales, ses lectures lui ont apportée non seulement la validation des connaissances de son père, mais aussi la compréhension de leur action sur l’organisme. 

« Par mes lectures, j’ai pu constater que ce que disait mon père avait un fondement scientifique. Tout ce que j’ai appris par mon père depuis mon enfance, je sais désormais que c’est vrai. »

Aleida, infirmière naturopathe
Aleida, infirmière à la délégation de santé de Mindelo, originaire de Santo Antao et convaincue du potentiel des plantes sur notre santé

Elle constate le désintérêt de la population pour cette connaissance traditionnelle. Alors que dans le temps tout le monde savait préparer une tisane, aujourd’hui, beaucoup de capverdiens ne savent plus préparer une infusion correctement. Pour préparer une tisane en infusion, les parties aériennes (généralement les feuilles, fleurs et tiges) doivent être ajoutées dans l’eau à ébullition, puis être laissées infuser dans l’eau 5 à 10 minutes en coupant le feu. Laisser bouillir des feuilles peut en effet détruire certaines molécules actives présentes dans la plante. 

Elle me raconte une expérience sur une communauté à San Pedro : les résultats sur les problèmes d’obésité, de tension et de diabète sont immédiats. Sa médecine naturelle bluffe ses collègues médecins.

Au Cap Vert comme en France, la formation des médecins passe sous silence les vertus et l’usage des plantes médicinales. Je rencontre les rares médecins qui utilisent les plantes sur l’île de Sao Vicente. Tous les deux viennent de Cuba. Dans ce pays, qui cherche à profiter de ses ressources naturelles, la médecine traditionnelle fait partie des enseignements généraux dispensés à l’Université de médecine.

Comprendre l’origine de sa maladie

Mon interview avec le Docteur Leido me rappelle mes rencontres aux Canaries. Son approche médicale naturaliste, qui me paraît désormais du bon sens, me semble pourtant très loin de la médecine officielle occidentale.

Le malade a besoin de comprendre l’origine de sa maladie pour la résoudre.

Leido Pontes,
un des rares médecins capverdiens à connaître le potentiel des plantes pour la santé

Les conditions de vie, les problèmes sociaux, l’alimentation, l’exercice physique : tous ces facteurs sur lequel un médicament n’a aucun pouvoir. Ainsi, il regrette la tendance à la surmédicalisation. Un médecin doit connaître son patient avant de lui prescrire des médicaments, pour comprendre ses problèmes personnels, sa situation familiale ou économique. À quoi bon prescrire des médicaments qu’un patient ne pourra pas acheter ? Au Cap vert, l’accès au soin n’est pas donné à tous, malgré les aides étatiques. 

« Le médicament résout 30 % des symptômes d’un malade. 70 % de ses maux ne dépende que de lui-même. »

Leido Pontes, médecin à la délégation de santé de Mindelo

Être son propre médicament ?

Il souligne l’impact du stress sur la santé. Impossible de ne pas aborder le coronavirus. Il regrette l’angoisse que provoque l’alarmisme face à cette épidémie. Il explique par le phénomène « décompensation », que la peur peut rendre une personne malade, avant même qu’elle soit touchée par le virus. Les organes sont tous interdépendants rappelle-t-il. Lorsqu’un organe est défaillant, le corps compense souvent sur les autres organes. Cette tension peut s’accumuler avec le temps sans être ressentie, mais lors d’un choc émotif important, l’organe ou l’organisme peut brutalement se dégrader : « la décompensation ».

« Quien tiene medicamento del miedo ? ».

Pour conclure, pour lui la santé est la paix intérieure. Une personne vivant à la campagne, avec un air pur et une bonne alimentation. Elle n’a pas besoin de médecin, d’hôpital, ou de technologie avancée dans le domaine de la santé. Elle vit en paix elle-même. C’est ceci la santé.

« Une santé naturelle »

Je repense à Adelso. Il en est l’illustration parfaite.

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